Portée au pinacle en Afrique en 1990, la démocratie y connaît aujourd’hui un reflux qui donne toute la mesure du chemin à parcourir pour son approfondissement et son enracinement. La transhumance ou le nomadisme politique, est rangé parmi ces travers.
La transhumance ou le nomadisme des élus politiques est récurrent dans notre pays. Il serait donc nécessaire voire important que le législateur s'y penche. Le maire Gilbert Francis KACOU de la commune de Hiré dans la région du Lôh-Djiboua, vient de quitter le RHDP pour rejoindre son parti d’origine le PDCI-RDA qu'il avait par ailleurs quitté pour le RHDP.
En effet, le problème qui se pose et qui mérite d’être élucidé, c'est que monsieur Gilbert Francis KACOU s'est fait élire maire sous la bannière du RHDP. Alors quitter le navire RHDP pour le PDCI-RDA semble être une trahison pour les militants du RHDP de la commune qui, par ailleurs, par des manifestations qui ont malheureusement fait des blessés, demandent sa démission.
En effet, le phénomène de transhumance pose à la fois des problèmes d’ordre éthique, moral et juridique sur la portée desquels les opinions divergent. À priori, le PDCI-RDA semble étonné que le départ du maire RHDP vers son parti d’origine puisse susciter autant de violences.
Comme nous le savons tous, pour toutes sortes de raison, la transhumance des élus politiques semble récurrente. Ce phénomène est très néfaste pour la Démocratie. En effet, lorsque les citoyens constatent que les élus qui se sont présentés sous les couleurs d’un Parti et en défendant ses principes et le programme rompent tout de go le contrat moral et renient leurs présumés convictions pour adhérer à un autre parti on peut comprendre que cela s’apparente à une trahison et alimente des quiproquos.
D’autre part, la transhumance s’accompagne souvent de révélation, de déballage de secrets du parti que quittent les élus nomades, créant ainsi des règlements de compte à l’égard d’anciens compagnons d’armes.
Cependant les conséquences de la transhumance sont nombreuses dont, notamment les préjudices qu’elle cause aux partis victimes qui ont usé parfois d’énormes moyens pour l’élection du cadre militant.
Que prévoit donc le législateur dans telles situations ?
La transhumance politique n’a rien de répréhensible au regard des règles qui gouvernent la vie démocratique. Elle est la manifestation de la liberté reconnue à chaque citoyen, d’adhérer à un parti politique ou de le quitter. Cependant, les tribunaux n’ayant jamais été saisis de la question, il n’y a guère à ce jour une jurisprudence en la matière. Mais plusieurs principes et dispositions légales permettent au plan civil, de demander en justice des dommages et intérêts mutants.
Néanmoins dans le cas d’espèce du Maire Gilbert Francis KACOU, seul le conseil municipal a le pouvoir de sa démission. Deux solutions peuvent donc y contribuer. D’une part, la démission collective des membres du conseil municipal entrainerait inéluctablement l’organisation de nouvelles élections pour procéder au renouvellement intégral du conseil municipal qui a son tour élirait le nouveau maire.
Et d’autre part, le refus de voter les délibérations proposées par le maire. Un refus pouvant entraîner la dissolution du conseil municipal et l’organisation de nouvelles élections. En tout état de cause, l’homme politique apparaît sous son caractère de plus en plus frivole, amoral au mépris des valeurs démocratiques et des motivations de son électorat.
Il serait donc utile que le législateur s’intéresse davantage à la question du nomadisme des élus politiques afin de gérer ces déviances.
Par Idriss DAGNOGO