Le récent classement des 15 villes africaines les plus sales du célèbre magazine américain, place Antananarivo, la capitale malgache, comme la ville la plus sale tandis que Maputo, capitale de la Mozambique, tient la lanterne rouge (https://midi-madagasikara.mg/classement-forbes-antananarivo-la-villes-la-plus-sale-dafrique/). La Côte d’Ivoire ne figure pas sur cette liste, aussi étonnant que cela puisse être. Cela veut-il, pour autant, dire la Côte d’Ivoire a des leçons à donner en matière de salubrité ? Oh non! Loin de là !
En parcourant plusieurs rues de Yopougon, pour ne parler que de cette commune, ce qui frappe ce ne sont pas seulement la multitude de maquis-restaurants, mais la présence de caniveaux bouchés, de rues jonchées de détritus et d’immondices, d’égouts nauséabonds au point de ne pouvoir circuler à certains endroits sans retenir sa respiration. Il n’est un secret pour personne, aujourd’hui, que les rues de la plus grande commune de Côte d’Ivoire sont extrêmement sales.
Et pourtant, à Yopougon comme tout autre part ailleurs, ce ne sont pas les efforts du gouvernement pour assainir l’environnement urbain de la Perle des Lagunes qui manquent. A côté des efforts de ramassage quotidien des ordures ménagères, des initiatives ponctuelles, comme la Journée nationale de l’hygiène et de la salubrité, sont menées chaque année.
Alors, comment expliquer qu’en dépit de tous ces efforts, l’insalubrité et le manque d’hygiène ne cessent de gagner du terrain dans les communes de la capitale et même dans les villes de l’intérieur? A cette question, il n’est nul besoin d’être un génie pour deviner qu’en Côte d’Ivoire, quand on pense à l’hygiène et à la salubrité publique, on croit que c’est seulement l’affaire de de l’État, en général, et des autorités municipales, en particulier.
Environ 25% du taux de morbidité dans le monde, imputable à un environnement insalubre
Il est, certes, vrai que dans la plupart des cas, les trottoirs et autres voies à l’intérieur des quartiers relèvent du domaine public et que le maire est tenu d’en assurer « la sûreté et la commodité de passage », y compris le nettoyage de ces voies, mais la loi reconnaît également que « c’est au propriétaire occupant, le locataire ou l’usufruitier de l’habitation qui doit en assurer l’entretien ».
Par-delà cette considération purement juridique, toutefois, il faut dire qu’étant donné que les populations riveraines demeurent les principales victimes de l’insalubrité et de ses corollaires, les maladies liées au manque d’hygiène, il est compréhensible et même logique qu’en assurant l’hygiène et la salubrité de leur environnement immédiat, elles sont en train de veiller à leur propre bien-être sanitaire.
Et cela d’autant plus que ce sont elles qui sont responsables de la mauvaise utilisation de ces ouvrages (caniveaux, regards avaloirs, tampons) lorsqu’elles y déversent des déchets solides. Les conséquences sanitaires sont indéniables. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) affirme que «la propreté est l’un des principaux déterminants de la santé publique» et qu’environ 25% du taux de morbidité dans le monde est imputable à un environnement insalubre.
Comment faire comprendre toutes ces implications au citoyen ivoirien lambda?
En attendant de disposer de la technologie appropriée qui va permettre à l’Etat de s’engager dans un processus vertueux d’économie circulaire, c’est-à-dire que ces déchets seront collectés, traités, pour la production de gaz qui va, à son tour, permettre de produire de l’électricité, selon certaines autorités, il ne reste que la sensibilisation des populations de sorte à créer une conscience environnementale aiguë, en insistant notamment sur l’impact négatif de l’insalubrité sur la santé.
Aujourd’hui, il ne faut pas voir autre chose dans les opérations de déguerpissement menées dans le District d’Abidjan, en dépit des émotions qu’elles suscitent. De toute façon, il faut saluer les efforts soutenus du Président Alassane Ouattara qui a fait de la salubrité une priorité absolue à travers les nombreuses mesures et divers ministères qui se chargent de cet épineux dossier.
Oussou Kouamé Rémi
Enseignant-chercheur à l’Université Alassane Ouattara-Bouaké
Expert en analyse socio-politique et économique