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Côte d'Ivoire : Comment Gbagbo s’est affranchi de toutes les pesanteurs et polémiques pouvant entraver sa marche en avant

Eco et politique

Côte d’Ivoire : Comment Gbagbo s’est affranchi de toutes les pesanteurs et polémiques pouvant entraver sa marche en avant

Il y a trois (3) ans, après dix longues années d’absence, dues à son emprisonnement à la Haye, le président Laurent Gbagbo foulait de nouveau le sol ivoirien, lavé de toute la souillure qu’on a voulu lui accoler, à la grande joie de ses partisans et de nombreux ivoiriens. L’accueil ne fut pas facile. Ce fut plutôt un véritable chemin de croix pour les nombreux ivoiriens sortis pour l’accueillir.

Attaqués par les célèbres « microbes », dispersés à coups de gaz lacrymogène par les forces de l’ordre, les partisans de l’ancien président ont subi à leur corps défendant, le double langage du pouvoir : mettre à la disposition de l’illustre arrivant, dans un esprit d’ouverture et d’apaisement, le pavillon présidentiel, et dans le même temps, donner des instructions pour que ces partisans ne se rassemblent ou ne rallient l’aéroport Félix Houphouët-Boigny de Port-Bouët. Mais l’homme est rentré et là se trouvait l’essentiel. 

Quelques jours après son retour, deux décisions du président Gbagbo, ont provoqué un véritable séisme qui a secoué le pays, et surtout la toile. La première, fut son retour à L’Eglise Catholique, matérialisé par la messe à laquelle il avait assisté à la cathédrale Saint Paul du Plateau, le 20 juin 2021, et la deuxième, fut la demande de divorce d’avec son épouse, portée à la connaissance du public par son avocat Me Mentenon.

L’onde de choc de ces deux décisions, n’était pas encore dissipée, quand eut lieu la rupture entre le président Gbagbo et son ancien premier ministre, Pascal Affi N’guessan, au sujet du contrôle du Front Populaire Ivoirien (Fpi). Dans la foulée, naquit le Parti des Peuples Africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI). Toutes ces décisions, tous les faits et gestes de l’ancien président ivoirien, ont dérouté plus d’un ivoirien et beaucoup plus les militants de son parti. Et pour cause !

Les attentes des ivoiriens étaient nombreuses, et chacun d’entre eux avait concocté un chronogramme d’activités qu’il aurait voulu voir Laurent Gbagbo exécuter. Pour les uns, son programme d’activités aurait dû débuter par la réconciliation au sein de sa famille politique, à l’effet de parvenir à une réunification de ce que furent les deux tendances du Fpi. Pour les autres, son premier acte aurait été de se rendre à Duekoué ou à Guitrozon, pour saluer la mémoire des nombreuses victimes de la crise postélectorale de 2010-2011 de ces deux localités. 

Pour d’autres encore, il aurait dû à sa descente d’avion, faire un message à la nation. Ce qui aurait donné une lisibilité à ses intentions. Dans l’incertitude et dans le doute, les faits et gestes du président Gbagbo étaient scrutés à la loupe pour décrypter sa pensée et percevoir ses intentions. A défaut d’y parvenir, de nombreuses personnes s’étaient laissé aller à des commentaires et à des affirmations, qui étaient juste le fruit de leurs propres fantasmes. Il n’était pas rare d’entendre que l’homme a changé. Laurent Gbagbo n’était plus le même. 

Mais comment pouvait-il en être autrement ? 

L’homme a passé dix(10) années de sa vie en prison. Dix années de prison, c’est dix années d’isolement, dix années d’introspection et dix années de réflexion, avec à la clé, des résolutions qui ne peuvent que dérouter.

Toutefois, le congrès constitutif de son nouveau parti, avait été l’occasion pour le président Laurent Gbagbo de décliner sa vision politique. Dans un message « urbi et orbi » délivré à la Côte d’Ivoire et à l’Afrique, comme le ferait le Pape à la ville et au monde, Laurent Gbagbo a exposé sa volonté au plan interne, d’aller à une véritable décrispation de l’atmosphère politique ambiante et à une politique « civilisée ».

Cela passe par l’élargissement des personnalités politiques et militaires, encore incarcérées dans le cadre de la crise postélectorale de 2010-2011. Il est incompréhensible que lui le principal accusé dont répondaient ces hommes politique et militaires, soit jugé, acquitté et libéré, alors que ces derniers continuent de croupir dans les « sous-sols » du pays. Plus rien ne justifie leur présence dans l’univers carcéral.Dans le message à l’Afrique, Laurent Gbagbo a mis en exergue sa vision de ce que doit être l’Afrique dans ses rapports au monde. 

Face aux grands pays et aux grands ensembles comme la Chine, la Russie, les Etats-Unis et l’Union Européenne, que peuvent les micro-états qui sont les nôtres ? Que peuvent des bandes de terre de quelques dizaines de km2, dotées d’un drapeau et d’un hymne national face aux mastodontes susmentionnées ? L’heure doit à être à bâtir de grands ensembles pour survivre. 

On retiendra également que depuis son retour, Laurent Gbagbo semble être dans une autre dimension. Il parle peu, et ne répond à aucune attaque d’où qu’elle vienne. Il s’est affranchi de toutes les pesanteurs et de toutes les polémiques pouvant entraver sa marche en avant. Voilà tout l’homme. Aujourd’hui, candidat désigné de son parti à la présidentielle de 2025, en dépit de l’hypothèque qui pèse sur sa candidature, l’homme continue sa marche, et demain nous situera. Demain est certes un autre jour, mais demain arrive toujours. Et point à l’horizon, le jour où l’ivraie sera séparée du vrai.

NAZAIRE KADIA 

Analyste politique

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