Il y a un (1) an, le 2 septembre 2023, les lampions s’éteignaient sur l’élection couplée des municipales et régionales 2023. Le moins qu’on puisse dire, le Rhdp a opéré une véritable razzia en s’octroyant la majorité des communes et des régions, ne laissant à ses adversaire qu’une partie congrue. Comment pouvait-il en être autrement ?
Les résultats du Rhdp étaient et sont à la dimension de sa mainmise sur l’Etat et ses démembrements, sur l’administration, sur les institutions et sur tous les secteurs d’activités. Un autre résultat aurait été le miracle du siècle en Eburnie. Ainsi le parti au pouvoir s’était adjugé 123 communes sur 201 et 25 régions sur 31. Le Pdci-rda, le plus vieux parti du pays a remporté 22 communes et 3 régions. Quant au Ppa-ci du président Laurent Gbagbo, le baptême de feu a été très difficile : 2 communes remportées.
En alliance Pdci-rda, 10 communes et 1 région sont tombées dans leur escarcelle. L’Union républicaine pour la démocratie (URD) de Danielle Boni Claverie, a remporté 1 commune. Les candidats indépendants avaient fait fort, malgré l’épée de Damoclès qui pesait sur leurs têtes. Ils ont remporté 41 communes et 1 région. Mais comme d’habitude, nombre d’entre eux sont allés offrir leurs communes ou régions au Rhdp!
Pour le Ppa-ci, la moisson a été maigre, au-delà des soupçons légitimes de partialité qu’on pourrait avoir à l’endroit de la structure en charge des élections. Mais ça, on le savait déjà. Et accepter d’aller à ces élections sans que les réformes exigées de cette structure n’aient été faites, on ne saurait se plaindre de sa partialité avérée et de sa « technologie ».
Cela dit, des années d’absence sur le terrain, laissent indubitablement des séquelles difficilement surmontables. L’eau a coulé sous le pont, et les responsables de ce parti ont dû noter que les choses ne sont plus ce qu’elles étaient, ou auraient dû être. Beaucoup d’électeurs et des cadres de ce parti ont migré ailleurs, soit pour préserver leur « tabouret », soit au nom d’une certaine « mystique » du développement de leur région, soit encore pour trouver des réponses aux nombreux problèmes existentiels qui les assaillent. D’autres encore ont vu leur ardeur émoussée du fait de nombreuses années d’inactivités.
On ne saurait passer sous silence le fait que les électeurs âgés de 20 ou 25 ans en 2010, ont aujourd’hui 34 ans et 36 ans. C’est un âge où la préoccupation essentielle est de trouver des réponses aux problèmes d’existence et de survie qui se posent à eux. Ceux qui avaient 10 ans ou 15 ans et qui sont désormais des électeurs, sont aujourd’hui âgés de 24 et 26 ans. Ils n’ont nullement été imprégnés du combat et des idéaux défendus alors par le Fpi, dont une frange est aujourd’hui devenue le Ppa-ci.
Le Ppa-ci, c’est un truisme de le dire, a subi également le contrecoup de l’effritement de ce que fut le Fpi
Pour nombre de ces jeunes, la croyance à un idéal, ou la noblesse d’un combat, n’ont aucune espèce d’importance. Et les élections auxquelles ils ont assisté ou participé depuis 2011, ont été marquées par une distribution massive d’espèces sonnantes et trébuchantes ou de babioles ; cela semble être désormais la norme. La pertinence d’un programme ou même sa faisabilité est le cadet des soucis. Formatés par cette façon de faire la campagne, ils ne pouvaient nullement avoir d’oreilles attentives pour un discours sur la noblesse d’un combat ou pour un programme que déclamerait un candidat au cours d’un meeting.
Au cours de ces meetings, quel que soit le candidat, quelle que soit son éloquence ou la pertinence de son programme, seule sa chute est attendue avec ferveur et impatience. Là où il devra annoncer la somme à distribuer. Les clameurs et les applaudissements sont à la hauteur de l’importance de la somme d’argent à distribuer. Cela est un fait qui est désormais entré dans les mœurs des ivoiriens et dont on doit absolument tenir compte.
De tous les candidats du Ppa-ci, combien sont-ils à pouvoir rivaliser avec leurs adversaires du Rhdp dans cette « nécessaire générosité » et ce « travaillement »? Le Ppa-ci, c’est un truisme de le dire, a subi également le contrecoup de l’effritement de ce que fut le Fpi. Scindés en trois partis rivaux, dont certains étaient des alliés objectifs du Rhdp ou d’autres partis, ils se sont affrontés sans merci sur le terrain, jetant le trouble et la confusion dans l’esprit de bon nombre de leurs partisans.
Peuvent-ils aujourd’hui nous faire le bilan de leur gestion, et nous montrer le développement fulgurant qu’ont connu leurs communes ou leurs régions ?
Au niveau interne, il va sans dire qu’une réorganisation s’impose pour mieux occuper le terrain. Le baptême a été difficile, mais des leçons doivent en être tirées. Il s’agit de définir des stratégies claires et de lancer des mots d’ordre tout aussi clairs, en orientant le combat sur des sujets d’intérêt national, à même de mobiliser les militants et par-delà, les ivoiriens. Il s’agit entre autres de la recomposition de la Cei, de l’audit et de la révision de la liste électorale, du découpage électoral, etc.
Les sujets d’ordre secondaire, comme le nom que doit porter ou non Simone Ehivet, sujet d’ordre privé, doivent être traités à titre privé par l’avocat du président Gbagbo. Ceux des candidats, qui avaient affirmé parler à l’oreille du chef de l’Etat, ou qui s’étaient vantés d’être les « bons petits » du Premier ministre avaient effectivement raflé la majorité des communes et des régions.
Peuvent-ils aujourd’hui nous faire le bilan de leur gestion, et nous montrer le développement fulgurant qu’ont connu leurs communes ou leurs régions ? Car chez nous, « …le développement est effectué en morceau choisi, en reconnaissance aux militants dociles, ou en représailles aux localités insoumises… », selon la belle formule de Mgr Marcellin Yao Kouadio. Ainsi va le pays.politiqu Mais arrive le jour où l’ivraie sera séparée du vrai.
NAZAIRE KADIA
Analyste politique