Le partenariat entre le FPI et le RHDP n’aura été qu’un mirage politique, une alliance bâtie sur des fondations instables et des attentes contradictoires. Dès le départ, cette alliance portait les germes de sa propre dissolution. Pourquoi? Tout simplement parce que le FPI, conduit par Affi N’Guessan, venait tout juste de mener une opposition virulente contre le régime du RHDP.
Le FPI avait, avec d’autres partis, appelé à la désobéissance civile et même à la création du CNT pour contrer ce qu’il considérait comme une dérive autoritaire lors du 3ᵉ mandat d’Alassane Ouattara. Un tel contexte faisait de l’alliance entre ces deux entités une sorte de trahison politique, du moins aux yeux de nombreux militants du FPI, qui ont vu cela comme une volte-face sans consultation de la base.
Et c’est là où se trouve l’une des principales erreurs de cette alliance : l’oubli des militants. Comment ignorer que les populations du Moronou, bastion de l’opposition, s’étaient mobilisées massivement pour suivre les mots d’ordre de boycott et de protestation, prenant même des risques personnels? Comment le FPI pouvait-il se tourner ensuite vers ceux contre lesquels il s’était battu, sans en payer le prix?
Le résultat ne s’est pas fait attendre. Lors des élections régionales, Affi N’Guessan a subi une défaite cinglante face à la candidate du PDCI-RDA, un parti qui, lui, est resté fidèle à sa ligne de conduite. Ce revers électoral n’était pas seulement un rejet de la personne d’Affi, mais surtout une sanction pour cette alliance jugée incohérente.
Aujourd’hui, à l’approche des élections de 2025, le FPI a choisi de rompre ses liens avec le RHDP, admettant tacitement l’échec de cette coalition. Les deux parties s’accusent mutuellement de ne pas avoir répondu aux attentes de leur partenariat, mais la réalité est plus simple : ils n’ont jamais été faits pour collaborer ensemble. Une alliance politique doit reposer sur des principes partagés et une vision commune, ce qui, manifestement, faisait défaut ici.
Le FPI devrait tirer les leçons de ces deux erreurs stratégiques consécutives
Désormais, le FPI semble se tourner vers Laurent Gbagbo et son PPA-CI. Certains voient cela comme un retour aux sources. Mais serait-ce réellement la meilleure option pour le FPI ? Je crains que cette nouvelle alliance (si alliance il y a) ne soit encore une fois une désillusion pour Affi N’Guessan. Pourquoi ? Parce qu’Affi n’attendrait rien de moins que Laurent Gbagbo fasse de lui le candidat de cette nouvelle coalition en 2025, si jamais Gbagbo lui-même ne pouvait se présenter.
Or, il est difficile de croire que Gbagbo, avec son propre passé et sa base militante fidèle, choisirait Affi comme porte-drapeau. Au contraire, cette alliance pourrait se retourner contre le FPI. Si le PPA-CI appelle au boycott des élections, que fera Affi ? S’aligner ou se rebeller une fois de plus contre ses alliés ? Dans tous les cas, il semble peu probable qu’Affi puisse obtenir une quelconque garantie de la part de Gbagbo pour porter la candidature de cette plateforme.
Le FPI devrait, à mon humble avis, tirer les leçons de ces deux erreurs stratégiques consécutives. Après l’échec de l’alliance avec le RHDP, il serait plus judicieux pour le FPI de se recentrer, de redéfinir son projet politique et de se donner le temps de regagner la confiance des Ivoiriens. Aucune alliance ne pourra sauver le FPI s’il ne parvient pas d’abord à convaincre par ses propres forces, ses idées, et son programme. Il est temps pour ce parti de jouer cavalier seul, de prouver sa valeur et de démontrer aux électeurs ce qu’il a réellement à offrir.
Ahouman Gaël Lakpa, Analyste Sociopolitique et Écrivain Ivoirien
