Je veux m’exprimer avec toute la lucidité nécessaire concernant un événement mettant en avant le coach sud-africain Tsere Nyawolomshini, invité à Abidjan pour marquer les 10 ans d’Equinox Fitness & Spa. Ce personnage, devenu célèbre grâce aux réseaux sociaux, est aujourd’hui porté au rang de « star » dans notre société. Cette invitation n’est pas anodine et met en lumière un phénomène préoccupant : notre capacité à ériger en modèles des individus qui, pour certains, n’incarnent qu’une culture de l’insouciance et du sensationnel.
J’ai suivi l’évolution de la popularité du sud-africain à travers des vidéos virales. En fait, ce qui devait au départ amuser ou distraire est devenu un phénomène. Ce n’est pas lui que je blâme, mais bien notre tendance collective à glorifier ce qui brille le plus, souvent sans fondement.
Aujourd’hui, c’est un spectacle populaire, mais il y a un message inquiétant qui sous-tend tout cela : des promoteurs ivoiriens de la médiocrité, sans vision pour des valeurs éducatives, sociales ou culturelles, consacrent son succès à Abidjan, nous rappelant à quel point la superficialité peut séduire.
Ce qui m’interpelle encore davantage, c’est la participation massive de sponsors, des marques notoires, prêtes à investir dans cet événement, mais qui se montrent absentes lorsqu’il s’agit de soutenir des initiatives dans l’éducation, la formation ou la culture.
Comment justifier un tel engouement financier et médiatique pour un show de fitness et non pour des programmes qui pourraient véritablement changer les vies et les mentalités ? Cela traduit une déconnexion grave dans les priorités de ces sponsors, qui misent sur l’éphémère et le spectaculaire au détriment de ce qui compte.
« J’appelle à un retour aux valeurs essentielles, un retour aux sources africaines »
La fascination d’une partie de notre jeunesse pour ce genre de divertissement, révélée par la grande mobilisation prévue lors de cet événement, montre à quel point la culture de la « viralité » est devenue dominante. C’est un appel lancé à nos décideurs et à nos leaders d’opinion pour repenser ce que nous mettons en avant. Il est primordial de réorienter cette jeunesse vers des valeurs qui forgent une identité forte et ne reposent pas sur le bruit médiatique.
Nous ne pouvons pas non plus ignorer le rôle des réseaux sociaux qui, tout en démocratisant l’accès à la popularité, tendent à élever au rang de vedettes des figures au contenu léger. Cette tendance, encouragée par le manque de discernement, crée un climat où le futile est célébré sans questionnement. Il est de notre devoir de faire preuve de sens critique.
J’appelle à un retour aux valeurs essentielles, un retour aux sources africaines. La Côte d’Ivoire, tout comme le continent, doit s’inspirer des sociétés qui valorisent les processus démocratiques, l’éducation et l’élévation par l’excellence. Plutôt que de s’égarer dans la recherche de « stars éphémères », nous devrions cultiver des talents et des modèles qui portent notre société vers l’avenir avec fierté et responsabilité.
Ahouman Gaël Lakpa, Analyste Sociopolitique et Écrivain Ivoirien
