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Relations Côte d'Ivoire - États de l'AES : Pourquoi il faut savoir raison garder (Par NAZAIRE KADIA) 

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Relations Côte d’Ivoire – États de l’AES : Pourquoi il faut savoir raison garder (Par NAZAIRE KADIA) 

C’est un truisme de le dire, les relations entre la Côte d’Ivoire et les États de l’Aes, le Burkina Faso, le Mali et le Niger ne sont pas au beau fixe. Si au niveau officiel en Côte d’Ivoire, la discrétion et la mesure sont de mise, au niveau des militants du Rhdp et de certains soutiens objectifs du pouvoir, il n’en est pas ainsi. De ce fait, lorsqu’un de ces États de l’Aes, aux prises avec des terroristes et des djihadistes, est l’objet d’une attaque, c’est une jubilation éjaculatoire et jouissive qui s’empare de certains militants du Rhdp et autres soutiens du pouvoir ivoirien.

Les commentaires tendancieux sont de mise, accusant les dirigeants de l’Aes d’être incompétents, incapables de jouer leur rôle régalien, celui de la défense de leurs populations. Certains poussent même le bouchon jusqu’à traiter ces États attaqués, d’États faillis. Mais comme on le voit, l’ignorance et la mauvaise foi sont passées par là.  

Ces pourfendeurs de l’Aes ignorent pour certains, que la guerre qui est imposée au Burkina Faso, au Mali et au Niger, est une guerre asymétrique et atypique qui n’oppose pas deux armées conventionnelles. Ce n’est ni une guerre de tranchées, ni une guerre de mouvement, avec un champ de bataille où s’affrontent deux armées. Ici la guerre a lieu partout et nulle part. Les terroristes ciblent des objectifs, attaquent et se fondent dans la nature.

Mais jusqu’à présent, la réaction des armées burkinabé, malienne et nigérienne a été à la hauteur des attentes de leurs populations. Les terroristes sont aujourd’hui traqués jusqu’à leurs derniers retranchements. Peut-on objectivement sans sourciller, affirmer que la France est un État failli, parce qu’il y a eu des attaques au « Bataclan » et à « Charlie Hebdo», avec de nombreux morts ? Peut-on affirmer sans être ridicule, que les Etats-Unis sont un pays failli, quand il y a eu l’attentat de septembre 2001 ?

Il faut savoir raison garder et ne pas se réjouir des difficultés auxquelles sont confrontés nos voisins. Il faut avoir à l’esprit que le Mali et le Burkina Faso représentent la « digue » qui, jusqu’à présent, empêche la Côte d’Ivoire et les autres États côtiers du Golfe de Guinée, de goûter aux délices des rodéos motorisés des terroristes et des djihadistes. Ceux-ci rêvent toujours d’avoir un pied-à-terre sur la côte du Golfe de Guinée.

Qu’adviendra aux États côtiers, si la « digue » venait à s’effondrer ? Il faut y réfléchir… Le 16 octobre dernier, le président Laurent Gbagbo a accordé une interview à Alain Foka d’Afo Media. Entre autres sujets abordés, figurait la situation des États de l’Aes. La position de Laurent Gbagbo, favorable aux régimes actuels au Burkina, Mali et Niger, a provoqué l’ire de nombreux militants du Rhdp, dans une période de tension diplomatique entre la Côte d’Ivoire et certains états de l’Aes. 

Y a-t-il une différence entre les coups d’États perpétrés par Oligui Nguema et Damiba et ceux d’Assimi Goïta, d’Ibrahima Traoré ou de Tiani ?

Pour ceux-ci, Laurent Gbagbo légitime l’accession au pouvoir par les coups d’États, et cette position est un véritable casus belli. Ils ne tardèrent pas à fondre sur lui et le traiter de tous les noms. Mais ici aussi, des interrogations demeurent. Si tant est qu’Abidjan abhorre les coups d’États, pourquoi recevoir en grande pompe le général Oligui Nguema, tombeur d’Ali Bongo au Gabon ? Ou dresser le tapis rouge à Paul Henri Damiba tombeur de Roch Christian Kaboré du Burkina Faso, avant sa propre chute ? 

Y a-t-il une différence entre les coups d’États perpétrés par Oligui Nguema et Damiba et ceux d’Assimi Goïta, d’Ibrahima Traoré ou de Tiani ? Si on peut légitimement condamner l’accession au pouvoir par les coups d’États militaires, on se doit également de dénoncer et de condamner le maintien au pouvoir par le tripatouillage des constitutions, à l’effet de de se donner des mandats supplémentaires, après avoir épuisé les deux qu’autorise la constitution. 

Ceci est également un coup d’État ; c’est un «coup d’état constitutionnel » ou un « coup d’état civil ». Les Ivoiriens diraient : «chimpanzé, y a pas son rouge ; chimpanzé c’est chimpanzé ». De ce fait, en la matière, les Ivoiriens n’ont pas de leçon à donner aux Maliens, Burkinabé et aux Nigériens quant à l’accession au pouvoir par la voie démocratique. Ces Ivoiriens doivent également avoir à l’esprit et surtout ne pas oublier que la rébellion armée, qui fut le socle de la marche vers le pouvoir, a été logée, nourrie et blanchie au Burkina Faso. 

Que reproche-t-on au Burkina Faso, au Mali et au Niger ?

De nombreux ressortissants de ce pays et ceux des autres États de l’Aes, ont pris une part active à cette odyssée macabre qui fait aujourd’hui le bonheur de certains. Que reproche-t-on au Burkina Faso, au Mali et au Niger ? De vouloir se sortir du carcan étouffant de la France ? Voudrait-on que ces États redeviennent des « filles » de la France comme la Côte d’Ivoire, qui en est l’aînée » ?

En tout état de cause, chaque État choisit sa voie, donne une orientation à sa marche en avant, prend les décision pour son peuple, et pour le bien-être de celui-ci. On peut de l’extérieur ne pas approuver ces choix, mais on se doit de les respecter. Le droit à la différence existe et il est absolument inopérant de faire « l’étranger qui pleure plus fort que la famille du défunt ».

Chacun suit sa destinée et « y a pas quelqu’un qui est quelqu’un que quelqu’un ici ». Il faut seulement, encore une fois, savoir raison garder, car à notre corps défendant, l’histoire et la géographie nous condamnent à une cohabitation. Essayons seulement de la rendre pacifique. Ainsi va l’Afrique. Mais arrive le jour où l’ivraie sera séparée du vrai.

NAZAIRE KADIA

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